Biodiversité MEDEFAujourd’hui se tenaient les rencontres « Entreprises et Biodiversité : Comprendre et Agir » organisées en partenariat entre le MEDEF et l’association Humanité & Biodiversité. Ce fut l’occasion pour Laurence Parisot (Présidente du MEDEF) d’insister, pour lancer la journée, sur son ambition : « Je veux que les entreprises françaises soient à la pointe sur ce sujet » et de constater que malheureusement « la science n’est plus au premier plan, alors qu’elle devrait tous nous rassembler ». Télécharger le guide : il est disponible ici.

 

En introduction Hubert Reeves (Président de l’association Humanité & Biodiversité) nous décrit le lien entre l’émergence de l’univers et l’émergence de la vie qui a conduit à l’apparition de l’Homme : « Une belle histoire ». Il regrette d’assister aujourd’hui à l’auto-destruction de l’homme, qui est responsable depuis les dernières décennies notamment de la grave crise environnementale. « La vie elle-même est extrêmement robuste » poursuit-il, « la véritable question c’est est-ce que l’Homme sera toujours là ? Quel sera l’état de notre planète en 2050 ? La disparition de la biodiversité n’est que peu médiatisé, qui s’intéresse à la disparition des vers de terre ? Alors que pour le changement climatique, on en parle à chaque grande tempête ! ». Il constate la montée de 2 forces : d’une part la destruction de la biodiversité n’a jamais été aussi grande et d’autre part le mouvement pour conserver la biodiversité est toujours d’ampleur croissante… Reste à savoir laquelle va gagner ! Cela ne l’empêche pas de conclure que « l’important n’est pas d’être optimiste ou pessimiste, mais c’est d’être déterminé ! »

Bernard Chevassus-au-Louis et Jean-Marc Michel (tous deux désignés préfigurateurs pour l’Agence Nationale pour la Biodiversité) rappellent que la biodiversité n’est pas une somme d’espèce mais bien le tissu du vivant avec toutes ses interactions en s’appuyant sur la métaphore : « la musique n’est pas une somme d’instrument, mais ce qu’ils font tous ensemble ». Il est aujourd’hui nécessaire que « les entreprises et la biodiversité s’apprivoisent réciproquement ». Les entreprises sont toutes dépendantes directement ou indirectement à la biodiversité, c’est un véritable levier de croissance. Gilles Boeuf (Président du MNHN)  insiste sur la place de l’Homme au sein du monde du vivant, et nous incite à faire preuve d’humilité face à la complexité de fonctionnement des écosystèmes.

Le MEDEF présente alors son nouveau guide « Entreprises et Biodiversité : comprendre et agir » à destination de l’ensemble des entreprises pour leur baliser le chemin de l’intégration de la biodiversité à leur activité. Rédigé par Emmanuel Delannoy (directeur de l’institut INSPIRE) avec le soutien notamment de Sylvain Boucherand, Nadia Loury et Marjorie Banès, il rappel les enjeux liés à la biodiversité et aux services écosystémiques pour l’entreprise puis donne des clés, méthodes et outils pour passer du diagnostic au plan d’actions en passant par la mise en oeuvre de sa stratégie biodiversité. Le guide est disponible ici.

Les entreprises présentent s’en rendent bien compte : « Notre premier fournisseur c’est la nature, il est clair qu’il faut que l’on participe à sa protection, c’est un contrat de long terme » affirme Bertrand Swiderski (directeur Développement Durable du groupe Carrefour). Le sujet commence à remonter l’ensemble de la chaine de valeur, « nous nous tournons vers nos fournisseurs pour sourcer des matières premières renouvelables respectueuses de l’environnement, afin de répondre aux interpellations de nos clients » indique Jean-Pierre Clamadieu, PDG de Solvay. Il identifie 2 grands enjeux de biodiversité pour son groupe, acteur majeur de la chimie : la remédiation des sites pollués pour son activité et la ressource en eau. On regrettera que les ressources renouvelables issues du vivant ainsi que le biomimétisme n’en fassent pas parties ! Christian Beranger, directeur Développement Durable de Cemex insiste sur le fait qu’aujourd’hui, il est plus que nécessaire de s’engager et de réintégrer la biodiversité dans sa stratégie d’entreprise car les assurances et les banques sont de plus en plus regardantes sur la gestion des risques liés à la biodiversité. Enfin, Sophie Gaudeul (secrétaire confédérale déléguée à l’environnement de la CFDT) insiste sur la nécessité d’impliquer les équipes internes des entreprises pour une bonne compréhension du sujet et une bonne gestion. On retiendra que même si les intentions sont bonnes, le changement n’est pas encore d’actualité « si le consommateur veut des tomates le 23 décembre, il faut que nous en ayons dans nos rayons » conclue le Directeur Développement Durable du groupe Carrefour ; donc pour les entreprises, de la biodiversité oui ! Tant que ça ne change pas le business…

Nous avons eu l’honneur d’avoir une intervention de clôture par Mme Delphine Batho, ministre de l’Écologie, du Développement Durable et de l’Énergie. On retiendra quelques éléments :

  • « Je salue l’initiative de rapprocher les entreprises et la biodiversité »
  • « Il est nécessaire aujourd’hui de mener le combat de la biodiversité et du changement climatique de front, l’un n’étant pas prioritaire sur l’autre »
  • « L’enjeu sur la biodiversité est bien de garder notre planète vivante, pour conserver l’ensemble des services rendus par les écosystèmes »
  • « Il est nécessaire de sortir de la vision statique de la biodiversité et de la mise sous cloche du vivant »
  • « L’artificialisation des territoires se fait au rythme affolant de l’équivalent d’un département tous les 7 ans »
  • « Je suis réticente à la marchandisation de la biodiversité, mais il y a des choses à faire sur la fiscalité écologique »

Ces rencontres auront permis de continuer à mettre le sujet sur la table et à mobiliser différentes parties prenantes… Espérons que grâce au guide un nombre croissant d’entreprises diagnostiquent leurs interdépendances à la biodiversité et s’engage dans des stratégies différenciantes, créatrices de valeur et de pérennité sur le long terme !