Prenons l’exemple des aménagements cyclables de la zone d’activité de Bellevue à Saint-Agathon, à proximité immédiate du centre de Guingamp dans les Côte-d’Armor. Créée dans les années 1980, cette zone industrielle avait pour vocation de répondre à la problématique de tension foncière sur la zone existante à Grâce, quelques kilomètres à l’ouest. Construits le long de la RN12, axe majeur reliant Rennes à Brest, les aménagements de voirie ont été réalisés conjointement à la création de l’échangeur pour « desservir convenablement la zone ».
La ZI de Bellevue présente donc les traits typiques d’une zone d’activité classique telle qu’on les connaît en France :
- En périphérie d’une ville petite ou moyenne ;
- À proximité d’axes routiers majeurs et d’une voie de chemin de fer représentant des obstacles quasi-infranchissables pour les cyclistes ;
- Facilement accessible en voiture ;
- Connaissant un trafic poids lourds important.
Ces infrastructures de voirie qui assurent toujours aujourd’hui la bonne desserte en véhicule lourd sont par la même occasion une coupure physique forte qui décourage l’usage de tout autre moyen de transport que la voiture, alors même que certaines personnes n’ont que quelques centaines de mètres à parcourir pour franchir cet obstacle qui se dresse entre leur lieu de départ et leur lieu d’arrivée.
Toutefois, les élus ont décelé le potentiel de développer l’accessibilité à vélo et à pied de la zone industrielle il y a près de 15 ans. En effet, la zone industrielle se situe à proximité immédiate du centre-ville de Saint-Agathon, de Guingamp et non loin de Ploumagoar et Grâce – autant de communes où résident un nombre significatif de salariés de la ZI. La communauté de communes de l’époque disposait d’un outil formidable, dont jouissent aujourd’hui tous les EPCI : la compétence d’aménagement de la voirie des zones d’activité. Aussi, dès 2009, la collectivité s’est lancée dans un programme d’aménagements cyclables de la zone d’activité : une piste bidirectionnelle le long de l’axe structurant de la ZI, accompagnée d’un cheminement piéton de l’autre côté de la chaussée.
La collectivité a su miser sur les outils à sa disposition pour sécuriser un cheminement pour les cyclistes et les piétons, en les séparant strictement du trafic routier. Néanmoins, si l’infrastructure est une condition nécessaire du report de la voiture vers le vélo, elle est loin d’être suffisante. C’est pourquoi Guingamp Paimpol Agglomération s’est tournée vers BL évolution pour la réalisation d’une étude d’accessibilité de la zone industrielle.
Pour garantir une accessibilité favorable aux modes actifs, nous avons défini plusieurs axes de travail et un plan d’action. Au-delà de la création d’itinéraires cyclables en site propre sur les axes pour lesquels la collectivité dispose de la compétence voirie, il est nécessaire de penser :
1/ La gestion des sorties d’usine et des traversées des axes principaux par :
-
- Un régime de priorité favorable aux vélos ;
- Une visibilité accrue des cyclistes, notamment celles et ceux qui travaillent parfois la nuit (éclairage, miroirs, panneaux à détection de cycliste, distribution de kits de sécurité avec des gilets jaunes).
2/ L’aménagement de stationnement vélo sécurisé sur la zone pour les cyclistes :
- En le mutualisant sur du foncier disponible appartenant à la collectivité ;
- À l’intérieur des sites des entreprises majeures ; le programme OEPV (Objectif Employeur Pro Vélo) permet de bénéficier de subventions à hauteur de 40% H.T. pour l’installation des attaches, abris et consignes sécurisées selon les cas.
3/ La mise en œuvre de services vélos favorisant la pratique par :
- La mise à disposition de vélos en libre-service ;
- La location longue durée dédiées aux salariées et salariés ;
- La mise en place de flottes de vélos à assistance électrique interne aux entreprises.
4/ L’organisation d’évènements et d’une communication spécifique pour favoriser le vélo et la marche pour se rendre sur la zone ciblée :
- Mai à vélo ;
- Challenges inter-entreprises ;
- Distribution de kits de sécurité ;
5/ La continuité des itinéraires en lien avec les communes avoisinantes :
L’accompagnement que nous proposons aux collectivités se base sur notre expertise, mais également sur l’observation d’infrastructures dans toute la France, où il nous arrive de puiser de l’inspiration dans des réalisations intéressantes et efficaces. Ainsi, l’exemple des aménagements cyclables de la zone d’activité de Saint-Egrève, dans l’Isère.
Reliée au réseau Chronovélo de la métropole Grenobloise, les aménagements cyclables dans cette zone suivent les exigences du haut niveau de service imposé sur l’ensemble du réseau : le revêtement et les largeurs confortables, la priorité aux intersections, l’uniformité visuelle ou encore la continuité sont autant de critères pris en considération lors de l’aménagement de ces tronçons. La création d’un sas entre la piste cyclable et la voirie principale, permettant l’attente des véhicules sans empiéter sur la piste cyclable, est un autre exemple de bonnes pratiques dont on peut s’inspirer.
Ainsi, ce réseau accessible à un large public de cyclistes permet une grande diversité d’usage, et la Zone d’Activité n’est plus imperméable aux déplacements à vélo, que ce soit pour s’y rendre depuis une ville voisine, pour y circuler jusqu’à son entreprise ou pour la traverser dans le cadre d’un trajet plus long.
L’exemplarité ne s’arrête pas là puisque le long de ces pistes cyclables sont installés des arceaux de stationnement et des espaces de prise en charge et de dépôt de vélos en free-floating. Ces équipements de service sont complémentaires aux aménagements de voirie, et forment un écosystème complet qui encourage les usagers à adopter la solution vélo.
On voit donc que les aménagements cyclables d’une zone d’activité, peu importe sa typologie, sont un levier majeur de report modal pour les EPCI qui disposent de tous les outils décisionnels et opérationnels pour le faire. Le nombre de déplacements en voiture que ces zones génèrent et leur relative dangerosité pour les modes actifs doivent faire l’objet d’une attention particulière des collectivités MOA sur ces espaces, en relation étroite avec les entreprises et employeurs.
En garantissant des itinéraires sûrs, continus et confortables, complétés par des stationnements, des services ou encore de la communication diffusant les bonnes pratiques à vélo, les collectivités peuvent créer une dynamique de changement de comportement des usagers de ces zones.
Mais au-delà de la simple accessibilité de ces espaces aux modes actifs, nous pourrions questionner la pertinence de certaines de ces zones, ou au minimum leur taille et leur ubiquité. En effet, si éloigner les activités industrielles des centres-villes et zones résidentielles apporte des bénéfices certains comme la facilitation de leur desserte en mode lourd – souvent nécessaire – ou encore la réduction des nuisances induites par certaines activités (trafic de poids lourds, pollution de l’air et/ou pollution sonore), la disponibilité foncière à bas coût dans ces zones excentrées en fait une concurrence très forte aux centres urbains pour des activités pourtant essentielles au quotidien (commerces alimentaires, services publics, cabinet médicaux, établissements de loisir ou de restauration par exemple).
Ce développement fort des ZAE alimente par la même occasion un cercle vicieux qui favorise l’étalement urbain et donc l’augmentation des distances à parcourir, et qui encourage structurellement l’usage de la voiture individuelle. Revenir à une économie de proximité pourrait donc se révéler judicieux à plusieurs titres, et pas seulement sur la question des mobilités ou de l’écologie.
Votre territoire comporte une ZAE, que vous souhaitez aménager en faveur des modes actifs ? BL évolution propose des accompagnements sur-mesure, allant de la planification aux études pré-opérationnelles et à la conduite du changement de comportements de mobilité dans les entreprises. N’hésitez pas à nous solliciter pour obtenir des réponses à vos questions.
Pour découvrir quelques éléments de réflexion et de méthode sur la question de l’accessibilité des ZAE aux modes actifs, lisez notre article : « Zones d’Accessibilité Exclusive ».