Le Forum Politique de Haut Niveau sur le Développement Durable (FPHN), réunion annuelle organisée par les Nations Unies afin d’examiner les progrès de l’Agenda 2030 sur le développement durable, traite chaque année un thème particulier et examine un ensemble spécifique d’Objectifs de Développement Durable (ODD).

La session 2020 s’est déroulée du 7 au 17 juillet, entièrement en vidéoconférence dans le contexte d’épidémie de Covid-19, sur le thème : « Accélérer le rythme des actions et des transformations : concrétiser la décennie d’action et de résultats pour le développement durable ». Un nombre record de 250 événements ont été organisés par les Etats ou organisations sur des thématiques liées aux 17 ODD, en particulier sur l’impact de l’épidémie de Covid-19 et la nécessité d’une reconstruction en s’appuyant sur les ODD. Les décisions prises dans les 18 prochains mois seront décisives pour la prochaine décennie.

L’épidémie mondiale aura un impact négatif fort sur les ODD liés à la pauvreté et aux inégalités

La crise provoquée par l’épidémie de Covid-19 affecte tout particulièrement les pays les plus vulnérables, ou à moyen revenu, fortement dépendants de l’activité économique du tourisme. Ainsi, cette année, le niveau d’avancement des Etats sur plusieurs ODD devrait reculer, notamment en ce qui concerne la pauvreté (ODD1), la faim (ODD2) et les inégalités (ODD 10). Ainsi, plus de 100 millions de personnes pourraient tomber dans la grande pauvreté en 2020, les femmes et jeunes du continent africain étant les plus touchés.

L’épidémie révèle essentiellement des faiblesses structurelles déjà existantes. Les différentes réponses apportées à la crise contribuent précisément aux ODD : développer une approche systémique basée sur la cohérence des politiques et des actions, associer à la reconstruction les échelons locaux, développer les institutions en lesquelles les citoyens ont confiance, renforcer les services publics, assurer le droit pour tous de se nourrir.

Par ailleurs, cette crise sanitaire internationale ajoute des défis inédits aux villes et collectivités en mettant l’accent sur des points faibles, notamment les systèmes de santé, d’éducation et de sécurité. Ces conséquences socio-économiques affectent de manière disproportionnée les groupes les plus vulnérables de la société (femmes, jeunes, migrants).

L’action locale est celle qui est à même « d’humaniser » les politiques publiques et de répondre aux aspirations concrètes des populations. D’autre part, les mesures de restriction des libertés prises dans le cadre des confinements ne doivent pas restreindre la capacité des populations à participer à la définition des politiques locales. Le numérique est évoqué à de nombreuses reprises dans l’objectif de créer des « villes intelligentes », avec une attention à ce que son application soit davantage portée vers l’amélioration des services publics de base (accès à l’eau, énergie, éducation, etc.).

Changement climatique et perte de biodiversité, facteurs aggravants des inégalités et de la pauvreté au niveau mondial

Par ailleurs, la hausse des émissions de GES et la perte de la biodiversité prennent une tendance préoccupante ces dernières années, ont mentionné les membres du FPHN. Or, ces bouleversements aggravent fortement le niveau de pauvreté des populations via la dégradation de la vivabilité de certaines régions où vivent des populations déjà vulnérables.

Afin de garantir un monde résilient pour l’écosystème, les populations et l’économie, il est nécessaire de repenser notre relation à la nature et notre approche de la gestion des ressources naturelles. Les secteurs privé, scientifique, académique, public… sont invités à se mobiliser pour protéger la planète. Une grande coopération régionale, nationale et internationale est également essentielle et encouragée via ces ODD, notamment le 17.

Ainsi, Dr. Sandra Diaz, Co-Présidente de l’IPBES, Plateforme intergouvernementale scientifique et politique sur la biodiversité et les services écosystémiques, est intervenue lors du Forum afin de présenter 3 recommandations en ce sens :

  1. Mettre en œuvre des plans de relance qui ne compromettent ni la santé des personnes ni la nature (« do no harm ») ;
  2. Modifier les investissements et subventions de façon à être durables et décourageant toute atteinte à la santé et à la nature ;
  3. Intégrer la protection de la nature et la santé dans tous les secteurs de l’économie, et pas seulement dans les questions environnementales (ex : alimentation, infrastructures…).

Des besoins de financement importants pour faire face aux crises

Pour faire face à la crise économique, sociale et environnementale en cours et à venir, la mobilisation de financements est au centre de l’attention. Or, il est attendu que ces nouveaux financements pour le développement soient correctement alloués pour ne laisser personne de côté et qu’ils soient alignés (financements publics comme privés) avec les ODD et l’Accord de Paris sur le climat. Pour cela, plusieurs recommandations ont été présentées lors du FPHN, parmi elles :

  • Mobiliser le secteur privé et développer davantage de partenariats entre le secteur public et le secteur privé ;
  • Prendre en compte la question de l’égalité des genres dans la mobilisation des financements ;
  • Adopter une approche centrée sur les facteurs de vulnérabilité des pays (ex : changement climatique, réponse aux pandémies, etc.).

Quelques faits marquants :

  • Le Vice-président de la Banque Européenne d’Investissement (BEI) a d’ailleurs fait part de son ambition de faire de la BEI une « banque climat » en renforçant les investissements verts.
  • La représentante du Groupe du financement du développement de la société civile a appelé les Nations Unies à travailler de façon approfondie sur des politiques d’allègement de la dette et des mesures d’annulation de la dette des pays en développement, sans pénalité ni intérêt.
  • Les Revues Nationales Volontaires (RNV) des pays sur leur mise en œuvre de l’Agenda 2030 sont nombreuses à avoir été présentées. D’importants progrès sur l’intégration des ODD sont à noter pour plusieurs pays : l’Arménie, l’Equateur, le Népal, la Géorgie, l’Inde, le Niger, le Kenya et l’Ouganda.

Quelles perspectives pour les prochains mois ?

Plusieurs événements dans la continuité de ces présentations auront lieu dans les prochains mois : la COP15 sur la diversité biologique en 2021, la Conférence de Stockholm+50 en 2022 (le 50è anniversaire de la Conférence des Nations Unies sur l’Environnement Humain), la 16e édition du Forum des Nations Unies sur les Forêts à New York en 2021.

BL évolution publiera son baromètre annuel le 25 septembre 2020 et le présentera lors d’un webinaire. L’occasion de suivre la mobilisation des entreprises françaises pour les ODD, 5 ans après leur adoption.