A peine son stage chez B&L évolution terminé, Marianne Rivière partait pour un road trip à vélo à Marrakech (Maroc) avec d’autres membres de l’association olmo.
Leur but ? Un voyage éco-responsable pour se rendre à la COP22 et à la COY12 (la conférence des jeunes), à la rencontre d’autres jeunes (et moins jeunes !) qui, comme eux, souhaitent agir pour leur futur, pour notre futur.
A son retour, cette jeune femme brillante, aux nombreux engagements associatifs (d’ailleurs accréditée par Ingénieurs sans frontières !), a accepté de répondre à nos questions et nous l’en remercions sincèrement. Interview…
D’abord, c’est quoi olmo ?
« olmo est une association française qui s’est constituée après la COP21 et la COY11 en décembre 2015. olmo s’investit dans le domaine de la mobilité durable et s’évertue à démocratiser les voyages à vélo en autonomie et itinérance de groupe d’amis, de familles avec enfants ou encore d’autres associations. L’association aide des petits groupes à partir en vélo, sans porter leurs affaires qui sont rassemblées et transportées dans des vélo-cargos à assistance électrique mis à leur disposition.
L’empreinte carbone de ce genre de voyages est extrêmement basse, de l’ordre de deux cents fois plus faible que ceux utilisant une voiture accompagnatrice thermique ou électrique, grâce à l’efficacité de la motorisation électrique et à la faible quantité de matière première nécessaire pour réaliser ce genre de vélo. Les olmonautes aiment utiliser des vélo-cargos Douze-Cycles car ils sont séparables et peuvent ainsi être transportés plus facilement par train, ce qui autorise de très nombreux voyages intermodaux train+vélo. »
Alors Marianne, as-tu eu l’impression de vivre un moment historique ?
« En fait, beaucoup moins que l’année dernière à la COP21 de Paris. La COP 22 était plus petite, il y avait moins de manifestations de la société civile, aussi bien dans la zone bleue qu’à l’extérieur. Elle était aussi moins médiatisée, en particulier très peu en France. Sinon le format de l’espace et des conférences était le même.
Les décisions prises étaient d’ordre organisationnel. Il n’y avait pas d’accord à signer à la fin comme à Paris. C’était une « COP étape », où les négociateurs faisaient le point pour préparer la prochaine COP importante qui aura lieu en 2018. Celle-ci devra en effet proposer un plan pour mettre en place l’Accord de Paris.
Pendant cette COP, on parlait également beaucoup des élections américaines qui affolaient les négociateurs. Leur frénésie était palpable.
Malgré tout, sur la route pour aller à Marrakech, nous avons rencontré beaucoup de Marocains qui avaient entendu parler de la COP22. Des zones ont été nettoyées, les plastiques interdits ou rendus payants… Je pense que pour le Maroc ce fut un événement très important et moteur de changements. Tout comme la COP21 le fut pour la France avec notamment le lancement des initiatives Territoires à Energie Positive pour la Croissance Verte (TEPCV), entre autres…
[NDLR : Nous vous invitons à consulter l’étude B&L évolution « TEPCV : effet de levier ou rendez-vous manqué ? » qui fait un premier bilan de l’appel à projet et qui sera bientôt téléchargeable depuis notre site web. Marianne y a activement contribué pendant son stage chez nous !]
Pour le monde associatif, ce genre événement reste évidemment une belle occasion pour porter des revendications et créer des synergies avec les différents acteurs de la Société ! »
Quelle(s) différence(s) entre COY11 et COY12 ?
« La COY11 était exceptionnelle dans le sens où elle a voulu rassembler des jeunes de tous horizons, pas seulement les YOUNGO [NDLR : les membres d’associations de jeunes qui sont accrédités pour observer ou participer aux négociations], c’était une grande première ! L’objectif était aussi d’organiser des COY locales sur chaque continent et interconnectées, afin que tout le monde puisse participer malgré la distance.
De même, la COY12 a voulu se montrer ouverte à tous les jeunes, elle avait donc le même format que la COY11. De nombreuses COY locales ont eu lieu un peu partout avant la COP à différentes dates. Quelques problèmes logistiques ont fait qu’une caravane de l’Afrique de l’Ouest n’a pas pu arriver et que les YOUNGO furent moins intégrés. Cependant à mon sens, ce fut une très belle expérience pleine de réussite pour porter les voix de la jeunesse. »
As-tu l’impression que ta génération peut faire avancer les choses sur le climat ?
« Oui bien sûr, car une partie d’entre nous est sensibilisée : on vit le changement climatique, on cherche à agir. J’ai le sentiment qu’on est plus sensibles à la problématique car on va en subir les impacts directs et indirects, on les subit déjà ! De là à dire qu’on peut faire avancer les choses, là, tout de suite… ça me semble un peu difficile. A notre échelle oui, sans aucun doute, mais à celle de la Société, les jeunes restent encore peu écoutés et peu visibles dans les médias.
Nos forces selon moi : notre réactivité sur les réseaux sociaux, notre maîtrise des nouveaux vecteurs d’information, un accès à une information pertinente, notre énergie et notre capacité à créer et à construire sur de nouvelles bases.
Pour influencer les négociations de la COP22, les YOUNGO organisaient des conférences de presse. Seul(s) un ou deux diplomate(s) venai(en)t ; les salles étaient essentiellement remplies de jeunes. Quelques diplomates soutenaient fortement les actions de la jeunesse au sens large. Celui des Seychelles notamment (gros soutien et impulseur de dynamiques) donnait par exemple de nombreux exemples sur la façon d’agir avec les jeunes dans les îles (via l’éducation, des projets participatifs…). De même le pavillon des pays nordiques était très accueillant pour les événements des YOUNGO.
Les YOUNGO ont aussi relancé un site web : une plateforme des différentes « organisations jeunes » du Monde qui agissent sur la thématique du climat. »
Que retiendras-tu de cette expérience ?
« En tout premier lieu, je retiendrai la complexité de la lutte contre le dérèglement climatique et pour la justice climatique.
Je ressens qu’il n’y a pas de vraie remise en question du modèle de Société dans lequel on évolue. Les COP sont des milieux qui restent consensuels sur ce point malgré tout.
Je ressens aussi une banalisation de la notion de changement climatique à force d’en parler tout le temps. Ça donne la sensation qu’on pourrait presque s’y habituer, ça enlève de l’énergie pour continuer de lutter. Peut-être aussi parce que la voix des plus vulnérables n’est pas assez entendue…
Je ressens en outre qu’il n’y a pas de réelle volonté d’agir de manière urgente.
Enfin, j’ai l’impression qu’une sorte de nouveau business est en train de prendre le pas sur la lutte. Tout cela me désole.
Mais pour finir sur une note plus positive, je suis en revanche convaincue que les COP sont un formidable espace d’échange et d’interconnaissance, de co-construction, de rassemblement et de luttes communes. »
Et maintenant, que vas-tu faire ?
« Travailler ou m’investir dans la création de toujours plus de lien, de passerelles entre les gens et collectifs qui pensent et agissent différemment.
Travailler ou m’investir (de manière associative) pour mettre en lumière les liens d’interdépendance (souvent liés au commerce et souvent générateurs d’inégalités) qui existent entre les différentes populations du globe. Et agir bien sûr, pour que nos modèles de Société réduisent ces inégalités et rapports de domination (exemple Nord-Sud).
Promouvoir des alternatives locales : favoriser la construction de modèles de Société ancrés sur leurs territoires, résilients et soutenables.
Continuer d’œuvrer pour un monde plus juste et soutenable, en somme ! »
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Merci pour cette interview Marianne. Nous te souhaitons beaucoup de succès dans tout ce que tu entreprendras !