Le gouvernement a publié un nouvel arrêté contre la pollution lumineuse dans lequel il propose de nouvelles normes techniques, des plages horaires pour l’extinction des lumières et un volet de contrôle.
Une série de mesures sur l’éclairage public et la mise en lumière d’équipements et de bâtiments la nuit a été publiée le 27 décembre au Journal officiel par le ministère de la Transition écologique et solidaire, après que le gouvernement eut été condamné par le Conseil d’Etat en mars 2018 pour son inaction sur la réglementation.
Cet arrêté vient se substituer aux deux arrêtés précédents (le premier est relatif à la prévention, la réduction et la limitation des nuisances lumineuses et le second concerne la liste et le périmètre des sites d’observation astronomique exceptionnels) qui avaient été soumis à consultation publique, et que B&L évolution avait commenté dans un article sur les actions mises en place par l’Etat pour lutter contre la pollution lumineuse. Petit tour d’horizon des nouvelles règles en vigueur dès 2019.
Nouvelles règles d’extinction la nuit
Ce nouvel arrêté du 27 décembre reprend certaines règles fixées lors du précédent arrêté telle que l’extinction des lumières des vitrines et des commerces ainsi que les éclairages des façades des bâtiments à 1h du matin et celles des bureaux 1h après la fin de l’activité. Les mesures qui ont été ajoutées concernent les lumières éclairant le patrimoine et les parcs et jardins accessibles au public (à éteindre au plus tard à 1h du matin) ainsi que les parkings desservant un lieu ou une zone d’activité (à éteindre 2h après l’activité). Ces mesures de réduction de la durée d’éclairement sont simples à appliquer, ce qui permet de diminuer les émissions de pollution lumineuse. Dommage que rien ne soit prévu pour l’éclairage public…
De nouvelles normes techniques sont également fixées en agglomération, hors agglomération ainsi que dans les espaces naturels protégés dans l’objectif de réduire l’intensité lumineuse des luminaires. L’arrêté interdit par exemple l’éclairage vers le ciel mais le texte mentionne un flux strictement inférieur à 4% sur site, ce qui est bien trop supérieur à la proportion de lumière à émettre pour que seul l’élément à éclairer ne soit visible. Nous avions en effet indiqué que pour limiter la pollution lumineuse et la création de halos lumineux, il est indispensable de ne pas éclairer vers le ciel mais uniquement là où c’est nécessaire, ce qui correspond tout simplement à un flux de 0%.
Un volet de contrôle a aussi été introduit dans ce texte afin que les installations d’éclairage puissent être vérifiées : donnée sur l’intensité lumineuse, date de mise en fonction, puissance électrique du luminaire, température de couleur de la lumière émise, etc. Selon l’élément à vérifier, le contrôle de conformité se fait soit visuellement soit par mesure (température de couleur) ou calcul. De nombreux acteurs travaillant sur la vie nocturne et les défenseurs de l’environnement saluent cet arrêté mais certaines ONG regrettent l’absence de « moyens de contrôle » accompagnant les mesures.
Réduire la consommation d’énergie pour protéger la biodiversité
Les LED censées réduire la consommation énergétique et la facture de l’éclairage sont en réalité nocives pour l’environnement car elles émettent plus de lumière que les ampoules traditionnelles. La couleur bleue émise dans le flux lumineux, considérée comme nocive pour la biodiversité (et potentiellement pour la santé humaine) vient d’être cadrée par l’Etat. Le texte mentionne désormais une température de couleur de 3000K maximum en agglomération (contre 3500K auparavant) et hors agglomération. La vision est largement suffisante à ce niveau et nous conseillons même d’utiliser des LED à 2700°K.
En parallèle, toujours dans l’objectif de protéger la biodiversité mais aussi la vision du ciel étoilé, onze sites d’observation astronomique ont été listés pour être protégés de la lumière nocturne dans un rayon de 10km, comme l’observatoire du Pic du midi par exemple.
La nuit, la lumière artificielle perturbe notre horloge biologique et affecte la faune et la flore nocturne. Certains animaux de nuit deviennent par exemple plus vulnérables car visibles par leurs prédateurs. Malheureusement, l’intensité lumineuse ne fait qu’augmenter chaque année. Ce nouvel arrêté devrait permettre d’enrayer ce phénomène. “Les mesures de protection de la biodiversité déjà en vigueur sont parfois méconnues et mal appliquées. Avec ces nouvelles règles, espérons que les professionnels de l’éclairage les prendront en compte dans leur cœur de métier”, souligne Rémy Osello, expert en pollution lumineuse au sein de B&L évolution.
Il ajoute : ”il est important de souligner le besoin de réglementation sur la pollution lumineuse. La France a connu un développement de l’éclairage qui s’est construit sans véritable règle, impactant fortement la vie sur Terre mais aussi notre bien-être, notre santé ainsi que la surconsommation d’énergie sur laquelle il est urgent d’agir. On retrouve aujourd’hui un climat différent d’il y a 5 ans sur le sujet de la pollution lumineuse. A l’époque, les extinctions étaient difficilement envisageables. Les pouvoirs publics étaient réticents à la rénovation avec des investissements à long terme. Aujourd’hui, dans les ateliers que l’on réalise auprès des élus ou dans les différentes études d’opinion que l’on peut trouver, on sent que l’éclairage subit une remise en cause importante et se recentre sur les nuisances. Ce qui est très positif !
Je reste toutefois un peu partagé, notamment par rapport à la première version de l’arrêté où des mesures importantes ont malheureusement disparu, comme celle concernant l’extinction de l’éclairage public, et plusieurs de nos propositions et celles de nos confrères qui travaillent sur le sujet n’ont pas été retenues. On peut toutefois saluer cet arrêté, qui sera, je l’espère un élément déclencheur favorable pour l’environnement nocturne.”