Le 18 septembre dernier, deux de nos experts étaient interviewés au journal de 20h de la rédaction de France 2, sur les questions de pollution lumineuse.
Eclairage des bâtiments résidentiels, des bâtiments non résidentiels et éclairage public participent au fait qu’on ne voit plus d’étoiles en ville depuis bien longtemps. Mais cette pollution a été multipliée par deux en 25 ans et les enjeux sont énormes. Il est urgent d’agir ! Un arrêté existe depuis 3 ans pour les bâtiments non résidentiels, mais il n’est pas appliqué. Où en sommes-nous ? Quelles sont les solutions ?
Les enjeux de la pollution lumineuse
On parle de pollution lumineuse (ou photopollution) « lorsque les éclairages artificiels sont si nombreux et omniprésents qu’ils nuisent à l’obscurité normale et souhaitable de la nuit. » (notre-planete.info)
Au-delà de l’effet esthétique (de ne plus voir le ciel étoilé dans les agglomérations), la lumière artificielle a un impact important sur la biodiversité, ainsi que sur la vie des hommes et même sur leur économie.
Cette pollution lumineuse est à l’origine de nombreuses perturbations pour les écosystèmes et participe fortement à l’érosion de la biodiversité. Cette présence abondante de lumière artificielle durant la nuit a un impact direct sur les populations d’insectes (lépidoptères et coléoptères notamment), piégés par phototaxie positive. La lumière artificielle perturbe également les repères des oiseaux migrateurs qui dans certains cas vont fuir la source lumineuse et dans d’autres vont être attirés et ainsi se tuer par collision avec les bâtiments.
La pollution lumineuse a également des impacts sur la qualité de notre sommeil, en réduisant la sécrétion de la mélatonine – « l’hormone du sommeil », ce qui influe directement sur notre santé (fatigue et stress).
Enfin, c’est un immense gaspillage énergétique. Ce gaspillage a un coût financier et un impact non négligeable sur le climat.
Quelques chiffres :
- L’éclairage représente 25 à 50% de la facture d’électricité des commerces,
- L’éclairage représente 18% de la consommation énergétique des bureaux en Ile-de-France,
- L’éclairage public représente 16% de la consommation énergétique des communes, 17% de leur budget et 41% de leur facture électrique,
- L’éclairage public mondial représente 6 % des émissions de gaz à effet de serre…
Que dit la loi ? Et l’opinion ?
L’arrêté du 25 janvier 2013, relatif à l’éclairage nocturne des bâtiments non résidentiels afin de limiter les nuisances lumineuses et les consommations d’énergie, est entré en vigueur le 1er juillet 2013. Il a pour objet de limiter les durées de fonctionnement de certaines installations d’éclairage la nuit, afin de réduire les gaspillages énergétiques et les nuisances lumineuses.
L’arrêté s’applique à la fois à l’éclairage intérieur émis vers l’extérieur et à l’illumination des façades de bâtiments. En particulier, il prévoit que les illuminations des façades des bâtiments soient éteintes au plus tard à 1h du matin et allumées au plus tôt à 7h. Pour les locaux à usages professionnels, il prévoit que l’éclairage soit coupé au plus tard une heure après la fin de l’occupation des locaux et allumé au plus tôt une heure avant l’occupation.
L’arrêté fixe les conditions dans lesquelles des dérogations à ces dispositions peuvent être accordées par les préfets de départements et précise quelles sont les autorités compétentes en matière de contrôle et de sanction des infractions à cette réglementation (maires d’une manière générale, préfets en ce qui concerne l’éclairage des bâtiments municipaux).
Trois ans après son entrée en vigueur, B&L évolution observe quelques petites améliorations, mais déplore qu’aucun contrôle ne soit effectué et qu’aucune sanction ne soit appliquée.
L’opinion publique, quant à elle, est plutôt très favorable à l’extinction des bureaux, des enseignes et des vitrines la nuit, mais est partagée sur la question de l’éclairage public. Il s’agit de freins liés à l’impression d’insécurité des personnes ou d’insécurité routière, au lien social et à la mise en valeur du patrimoine.
Les solutions
Concernant l’extinction des lumières des bâtiments, il existe des solutions techniques assez simples, nécessitant bien sûr des investissements, mais dont le retour sur investissement est très rapide (de l’ordre d’une année de fonctionnement). Et cela répond par ailleurs à la politique environnementale ou RSE des entreprises, lorsqu’elles en possèdent une.
Mais avant tout, ce sont les mentalités qui doivent changer.
Créé en 2009, le Jour de la nuit est une opération de sensibilisation à la pollution lumineuse, à la protection de la biodiversité nocturne et du ciel étoilé.
A l’occasion du Jour de la nuit 2016, une enquête vient d’être lancée sur la plateforme NuitFrance. Cette enquête vise notamment à alimenter le contenu d’une conférence scientifique qui aura lieu le 8 octobre prochain au sein de la Réserve ornithologique du Teich. Il s’agit de recueillir les ressentis et des témoignages sur la nuit, la biodiversité nocturne et la pollution lumineuse.
Nous vous invitons à y répondre nombreux et rapidement ; plus il y aura de répondants, plus les résultats de l’enquête seront fiables. Plus d’information sur le site d’Humanité et biodiversité et sur celui de NuitFrance, où vous trouverez le formulaire en ligne.
Au niveau des collectivités territoriales – indépendamment de l’enjeu environnemental – le montant de la facture énergétique, le parc vieillissant et la baisse des dotations de l’Etat les incitent fortement à se pencher sur la question de la modernisation de l’éclairage public, malgré les réticences de certains habitants.
En matière de sensibilisation, le concours « Villes et Villages Etoilés » de l’ANPCEN est une vraie réussite auprès des communes. La labellisation à base d’étoiles permet d’évaluer l’amélioration au fil des années. A l’instar du concours « Villes et villages fleuris », ce label récompense les efforts de la commune et lui permet de communiquer positivement auprès de ses habitants. La grande majorité des communes labellisées connaissent par ailleurs ainsi les objectifs fixés par le Grenelle II sur cette thématique.
Depuis 2012, B&L évolution s’intéresse en particulier aux bâtiments non résidentiels, qu’ils soient publics ou privés. B&L évolution publie régulièrement les résultats de son étude « Pollution lumineuse à la Défense », l’un des sites les plus éclairés de la Métropole parisienne. Il s’agit d’un classement des grandes tours les plus éclairées, de manière à les inciter à revoir et à améliorer leurs pratiques.
D’importants efforts restent encore à mener, en commençant par les plus grands bâtiments. Les experts de B&L évolution se tiennent à la disposition de toutes entreprises des secteurs publics et privés, qui souhaiteraient être accompagnées sur ces problématiques énergétiques.