Lundi 28 septembre, Bruno Lemaire a présenté le projet de loi de finances 2021. Comme la France s’y était engagée en 2017, le budget a été passé au crible d’une analyse environnementale afin d’identifier comment il contribue à la transition écologique.
La démarche adoptée par le gouvernement est celle du budget vert, développée par l’Inspection Générale des Finances (IGF) et le Conseil Général de l’Environnement et du Développement Durable (CGEDD). En s’adonnant à cet exercice, la France se positionne comme pionnière avec l’objectif de présenter les indicateurs favorables et défavorables à l’environnement et ainsi d’identifier les axes d’améliorations des finances publiques.
Budget vert, de quoi parle-t-on ?
En 2017, au One Planet Summit, la France a lancé le Paris collaborative on Green Budgeting avec l’OCDE et le Mexique. L’objectif de cette initiative est d’élaborer de nouveaux outils pour évaluer l’impact, et améliorer l’alignement, des dépenses et recettes nationales sur le climat et autres enjeux environnementaux. Le Conseil général de l’environnement et du développement durable et l’Inspection générale des finances ont ainsi publié un rapport proposant une méthode pour une budgétisation environnementale, en septembre 2019.
Le gouvernement a ainsi l’objectif d’évaluer les impacts environnementaux des politiques budgétaires et fiscales ainsi que d’évaluer leur cohérence par rapport aux engagements nationaux et internationaux.
La méthodologie du budget vert développée par l’IGF et le CGEDD propose de passer en revue les dépenses au regard de 6 axes environnementaux :
- Atténuation du changement climatique
- Adaptation au changement climatique
- Utilisation durable et protection des ressources en eau
- Transition vers une économie circulaire
- Prévention et contrôle de la pollution
- Préservation de la biodiversité
Les dépenses sont ensuite affectées en fonction de leur impact sur l’environnement : favorable, neutre, défavorable.
Comment se positionne le budget 2021 ?
C’est la deuxième année que le budget français s’adonne à l’exercice du budget vert. Fin 2019, c’est le think thank I4CE (Institute for climate economics) qui avait analysé le budget 2020 afin de proposer une première analyse de ce dernier au regard de son impact environnemental. Le bilan était présenté comme suit :
- 20 mds € pour la transition bas carbone, à travers son budget et sous forme de niches fiscales
- 17 mds € défavorables au climat, principalement sous forme de niches fiscales notamment sur les énergies fossiles (exonération du kérosène des avions et d’autres)
- A ces dépenses, I4CE ajoute 43 mds € d’impôts incitant indirectement à réduire les émissions GES.
Le projet de loi de finances pour 2021, présenté par Bruno Lemaire, Ministre de l’Economie et des finances, se positionne déjà dans une logique d’amélioration. En effet, sur les 52,8 milliards d’euros de dépenses étudiées, 72% (soit 38,1 milliards d’euros) sont considérées comme favorables à l’environnement, ce qui représente 30% de plus que l’année précédente. De même, 19% (soit 10 milliards d’euros) sont considérés comme défavorables à l’environnement, soit 10% de moins que pour 2020.
Parmi les dépenses défavorables à l’environnement, le gouvernement présente 5,1 milliards d’euros de dépenses fiscales via des taux réduits sur les taxes intérieures de consommation des produits énergétiques relative aux carburants, ainsi que les dépenses en faveur du transport aérien.
Toutefois, le budget 2021 s’élève à 488,4 milliards d’euros. Cela signifie que seul 11% du budget est considéré comme ayant un impact sur l’environnement, le reste étant considéré comme neutre pour l’environnement. La méthodologie étant encore récente, cela peut expliquer un tel résultat. Cependant, cela amène également à se questionner sur cette catégorie et sur la finesse des différents axes environnementaux. Que 90% du budget soit neutre peut paraitre surprenant. Si tel est réellement le cas, l’objectif des prochaines années sera de faire en sorte que ces dépenses deviennent favorables à l’environnement.
Qu’en est-il des budgets des territoires français ?
Au-delà du budget national, chaque dépense publique devrait s’atteler à cet exercice. Certaines villes et collectivités se sont donc lancées dans l’exercice. Certaines se concentrent sur la partie climat (atténuation et adaptation au changement climatique) quand d’autres analysent leur impact sur les 6 axes environnementaux (voir plus haut), à l’image du gouvernement.
Il s’agit avant tout de premières expérimentations pour ces villes telles que Strasbourg, Lille, Paris, Bordeaux ou encore Muttersholtz. Le partage de ces pratiques pourrait entrainer chaque collectivité à faire la revue de son budget au regard de son impact environnemental. Une mesure de plus pour suivre sa contribution à la transition écologique !