L’Accord de Paris sur les changements climatiques est ratifié depuis le 5 octobre dernier, le double seuil-clé qui était nécessaire pour cela ayant été atteint à cette date (voir ci-après).
Il entrera en vigueur le 4 novembre, soient quelques jours avant le début de la Conférence des Parties de Marrakech.
Du jamais vu à l’échelle d’un accord de l’ONU : une raison de s’en réjouir, parmi d’autres !
Un accord étatique historique
L’Accord de Paris sur les changements climatiques a été adopté en décembre 2015 par les 196 Parties (195 Etats et l’Union Européenne) à l’issue de la 21ème Conférence des Parties (COP21) qui s’est déroulée en France. Il s’agit d’un accord universel et ambitieux, dont l’objectif est de contenir la hausse des températures bien en-deçà de 2°C, voire de la limiter à 1,5°C. Il a été déposé aux Nations Unies à New York et ouvert à la signature le 22 avril 2016 – Journée de la Terre-Mère – pour une durée d’un an.
Un processus de ratification en deux temps
La signature par une Partie reflète uniquement son intention d’être tenue par l’Accord. Chaque pays doit ensuite déposer formellement son instrument de « ratification, d’acceptation, d’approbation ou d’accession » auprès du Secrétaire général des Nations Unies.
Un groupe d’une dizaine de jeunes a d’ailleurs conçu un outil de suivi pertinent, nommé Paris agreement ratification. Celui-ci permet de connaître en temps réel l’état d’avancement de la signature et de la ratification de l’Accord par chaque Etat, ainsi que la proportion des émissions globales couvertes.
Il fallait au minimum 55 Parties ayant ratifié l’Accord sur leur territoire, représentant au minimum 55% des émissions mondiales de gaz à effet de serre (GES), pour que celui-ci soit ratifié. C’est chose faite depuis le 5 octobre dernier. L’Accord entrera en vigueur le 4 novembre 2016, exactement 30 jours plus tard et ce, juste avant le début de la COP22 de Marrakech.
Trois bonnes raisons de nous réjouir !
Car oui, il s’agit d’une bonne nouvelle :
Il eut été difficile d’aller plus vite…
Il n’aura fallu que 6 mois pour ratifier l’Accord de Paris. C’est une première au niveau international. Rappelons que la ratification est un processus qui prend du temps, car il demande à être approuvé formellement par les instances de chaque Etat.
Les plus gros émetteurs de GES se sont engagés
S’il était attendu que les petits Etats insulaires s’engageraient rapidement, la ratification de l’Inde – et dans une moindre mesure celle de la Chine – dès 2016, est une très bonne surprise. Le Monde a enfin compris l’enjeu. On n’est plus en train de se questionner sur le fait qu’il y ait ou pas un changement climatique, mais sur le « comment faire » pour limiter ce changement.
La COP22 va pouvoir avancer vers encore plus de concret
La COP22 ne sera pas dans l’incertitude de la ratification de l’Accord précédent. Elle va donc pouvoir se pencher sur d’autres sujets et en particulier sur la mise en œuvre.
On attend notamment des engagements sur le Fonds vert pour le climat et les mesures d’adaptation, afin que le discours sorte du « on va faire » pour passer au « comment » on va faire.
Pour mémoire, le Fonds vert correspond un fond d’au moins 100 milliards de dollars US par an que les pays développés se sont engagés à donner à partir de 2020, pour permettre aux pays en développement de lutter contre le dérèglement climatique tout en favorisant un développement durable et juste. En revanche, à ce jour, on ne sait toujours pas qui va financer tout cela.
Une mobilisation sans précédent de la société civile
Un accord non-étatique
En parallèle de cet accord entre Etats, le Sommet mondial des acteurs du climat – Climate Chance – s’est tenu à Nantes du 26 au 28 septembre.
Plus de 3000 acteurs non-étatiques du Monde entier – ou « non-Parties concernées » – étaient réunis pour mettre en place leur propre accord : la Déclaration de Nantes des acteurs du climat. Cette démarche vise à renforcer l’action concrète des territoires, pour combler le fossé entre les engagements actuels et l’objectif de l’Accord de Paris. Cette implication absolument indispensable des territoires avait d’ailleurs été identifiée à Lima, dans la foulée de la COP20.
En voici la version signée au 7 octobre 2016.
Les points suivants ont particulièrement été mis en exergue lors de ce sommet :
- Les entreprises et les collectivités prennent conscience de leur responsabilité et s’engagent,
- De plus en plus d’outils se mettent en place pour suivre l’engagement des acteurs non-étatiques, en particulier la plateforme NAZCA ou le programme ACT (de l’ONG anglaise CDP et de l’ADEME).
Les citoyens eux aussi se mobilisent
Enfin, un troisième pilier est apparu. L’année 2016 a en effet vu la prise en main du sujet par les citoyens avec, par exemple, le blocage du Sommet de Pau (#stopMCEDD) ou la mobilisation citoyenne autour du projet d’aéroport de Notre-Dame des Landes (#stopNDDL). De plus en plus de personnes sont aujourd’hui vigilantes à ce qu’aucun projet en contradiction avec l’Accord de Paris se concrétise. Le film Irrintzina (en préparation) retrace l’émergence de cette dynamique citoyenne.
En conclusion
En moins d’un an, un tableau intéressant a commencé à se former. Des Etats prêts à rendre des comptes, des entreprises et des collectivités engagées, et des citoyens qui sont là pour avertir lorsque ces acteurs s’éloignent du « bon chemin ».
Certes, il est toujours possible de douter de la réussite de ces engagements, notamment parce que l’Accord de Paris ne prévoit pas de sanction et que les acteurs non-étatiques prennent des engagements encore trop faibles, sans parler du financement. Mais ce qui a été fait en un an est déjà remarquable.
L’an passé, les gens étaient à quai en se demandant si le bateau allait partir. La COP21 a permis de donner une direction au bateau. En 2016 on a hissé les voiles, largué les amarres et tout le monde est monté dans le bateau.
Nous conclurons par un clin d’œil à l’Odyssée des Alternatives Ibn Battûta, dont la vocation est de contribuer à relever le défi du changement climatique en construisant la Méditerranée des initiatives émancipatrices et des solidarités. Son objectif à l’horizon 2020 est d’obtenir que 50% des crédits nationaux et internationaux du Fonds vert soient consacrés à l’adaptation basée sur les communautés et les écosystèmes. Son édition 2016 passera évidemment par la COP22. Espérons que cette flottille qui fait le tour de la méditerranée avant la COP22 guidera l’ensemble des acteurs !
La suite à Marrakech…